Le roi d'Espagne menacé d'excommunication s'il promulgue la loi sur l'avortement

La position de Juan Carlos me paraît très difficilement défendable ; autant ce que vous souhaiteriez, Lorenz, était possible pour un roi tel que Louis XVI, qui n'était pas pleinement responsable de l'établissement d'un régime constitutionnel malgré des erreurs flagrantes mais issues d'une bonne volonté, autant cela ne l'est pas pour le roi d'Espagne. Comment en effet s'en prendre uniquement à la démocratie, quand ce roi est lui-même responsable de son développement dans son pays, et qu'il se vantait encore il y a peu que sa monarchie était le meilleur garant de la démocratie en Espagne ? Non, à mes yeux, s'il promulgue cette loi, il méritera pleinement cette excommunication, car son action politique fait honte au sang capétien et aux Bourbons. Il serait à souhaiter que cela le fasse un peu réfléchir à l'héritage qu'il devrait incarner, mais nous verrons ce qu'il adviendra.

Vos précisions ont été les bienvenues sur le Salon Beige, Lulo. Effectivement, on voit très vite où veulent en venir les républicains nationalistes, en voulant faire croire que la monarchie ne sert à rien (en faisant exprès de ne pas distinguer monarchie traditionnelle et monarchies constitutionnelle et parlementaire) et que ce sont uniquement les hommes qui feraient la valeur d'un régime, quel qu'il soit (attitude très libérale qui sous-entend qu'ils seraient pleinement satisfaits d'une république chrétienne, n'ayant rien retenus de certains exemples de l'histoire).

Alors c'est sûr que les monarques parlementaires qui nous entourent semblent avoir encore moins de pouvoir que notre président qui bénéficie d'un maigre et lointain héritage du bonapartisme à l'origine assez absolutiste, mais ce qui est certain c'est qu'il est toujours plus facile de restaurer une monarchie traditionnelle avec un roi déjà en place que de renverser une république comme la nôtre qui campe sur une mythification malhonnête de la Révolution...

Ce que j'aimerais que le roi d'Espagne fasse, c'est qu'il refuse de promulguer cette loi et qu'il appelle les catholiques espagnols à le soutenir, quitte à réclamer une modification de la constitution à l'avantage d'un pouvoir souverain qu'il n'a pas. Mais bon, il y a peu de chance qu'il ait envie de faire ce qu'il aurait été plus facile d'obtenir à son avènement, en essayant de convertir les forces franquistes en fidélité à un royalisme fort.

Ordre naturel a écrit:mais je comprends qu’un espagnol veuille garder son roi

Je profite de cette phrase pour rebondir : si les Espagnols aimaient vraiment leur roi et la monarchie, ne voudraient-ils pas plutôt que ce roi dispose d'un pouvoir souverain réel ? Je ne suis pas espagnol, mais comme pour beaucoup de monarchies européennes, j'ai l'impression que tout le monde s'en fiche complètement ou presque. D'autant que, si on est un peu cynique, ils garderaient leur roi quoiqu'il en soit, puisqu'il n'est pas question de guillotine ou d'exécution, et ils pourraient toujours le voir dans les magazines.

En tout cas, le cas de conscience se précise :

18 décembre 2009
Les députés espagnols ont adopté le projet de loi sur l'avortement

... par 185 voix contre 158. Le projet doit encore passer au Sénat.

Source : Le Salon Beige